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Page:Gabriel Ferry - Le coureur des bois, Tome I, 1881.djvu/430

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n’était rien en comparaison de celle qui envahit le camp à cette nouvelle imprévue. Qui allait commander ? qui allait obéir ? Cependant, au milieu du désordre chacun courut se ranger au poste qui lui avait été assigné le jour précédent. L’anxiété régnait sur le visage de tous.

Il y eut pourtant un moment où chacun reprit courage.

Les cavaliers indiens n’étaient qu’au nombre de six, et, au lieu de s’avancer au galop de leurs chevaux et en poussant leur cri de guerre, ils marchaient avec calme vers les retranchements. L’un d’eux agitait au bout de sa lance un chiffon blanc, qui représente le drapeau symbole de paix dans tous les pays.

Arrivés à deux portées de carabine, le cavalier au drapeau blanc se détacha du groupe de cavaliers ; les autres s’étaient arrêtés. Après quelques pas, le parlementaire s’arrêta aussi et agita de nouveau son drapeau.

Un des aventuriers, originaire du préside de Tubac, avait eu quelques relations avec les tribus apaches, et il savait assez de leur langage pour entendre et parler le dialecte moitié indien, moitié espagnol, en usage sur les frontières.

C’était un homme petit et maigre, qui, aux yeux des Indiens, admirateurs, comme tous les barbares, de la beauté extérieure, devait assez mal représenter l’autorité suprême. Aussi sa répugnance était excessive à se charger de ce rôle, qu’il lui fallut cependant accepter. Les aventuriers ne devaient pas, dans l’intérêt de leur salut et pour l’heureuse issue de la conférence qui devait avoir lieu, paraître privés de leur chef. Un mouchoir, jadis blanc, servit à représenter de son côté le drapeau parlementaire.

L’aventurier, son nom était Gomez, sortit fortement ému des retranchements pour s’avancer vers l’Indien, dont la contenance ferme contrastait avec la contenance timide du chef improvisé des blancs. Cependant il se ras-