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Page:Gabriel Ferry - Le coureur des bois, Tome II, 1884.djvu/249

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tard qu’ils avaient, une fois dans leur vie, rencontré ce miraculeux animal, passé dans les Prairies à l’état de tradition.

Les auditeurs d’Encinas allaient, en suivant son exemple, s’étendre autour de leur foyer pour s’endormir ; car depuis longtemps déjà leurs maîtres s’étaient retirés sous leurs tentes, lorsque la voix du dogue se fit entendre à nouveau.

« Quelque voyageur, sans doute, » dit Encinas en se relevant sur son coude et en regardant autour de lui avec assez d’indifférence pour faire croire qu’il était sûr de son fait ; et peu de minutes après, à l’endroit où venait expirer la lumière des foyers, deux individus à cheval débouchèrent de la forêt dans la clairière.

Celui des voyageurs qui marchait le premier arrêta son cheval et parut contempler avec surprise le singulier tableau qu’offraient le Lac-aux-Bisons, les tentes dressées sur ses bords, le reflet des feux tremblants sur sa nappe noire, et les sauvages cavaliers couchés près des foyers, à moitié ensevelis dans l’ombre d’un côté, baignés de l’autre d’une clarté d’un rouge vif.

Le second voyageur portait à la main une longue carabine, et tenait en laisse, de l’autre, un cheval chargé de quelques légers bagages, tels que deux petites valises de chaque côté du bât, une tente de campagne et une boîte qui pouvait être tout aussi bien un herbier qu’une boîte à couleurs.

Tandis que le premier voyageur ne paraissait occupé qu’à contempler le côté pittoresque de la scène dont il était venu tout à coup spectateur, le second semblait chargé de l’envisager sous le côté réel.

« Faites votre devoir, dit le premier au second en langue anglaise.

– Mon devoir est tout fait, reprit ce dernier ; votre seigneurie est parfaitement en sûreté ici. »

En disant ces mots, il poussa son cheval vers les dor-