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Page:Garnir - À la Boule plate.djvu/24

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cieusement, jouissant de la figure étonnée et souriante du jeune homme, qui prit congé d’eux en se disant qu’ils avaient l’air de braves gens.

Mme Rollekechik riait de bon cœur. « Ça est tout de même un vieze, cet Odon ! » dit-elle tout haut, quand il retourna à sa marmite et elle à son comptoir.

La jovialité simplette de Rose s’amusait de ces « zwanzes ». Son mari en prenait du prestige ; quand il avait fait de la peine à Rose, — et il lui en faisait sans trop se gêner, à l’occasion, — il savait, d’un mot, se faire pardonner en l’obligeant à rire.

Au fond, il n’était pas égoïste ni mauvais ; il avait simplement le sentiment arrêté de la supériorité du mari sur l’épouse, une suffisance un peu dédaigneuse, qu’il tenait sans doute de ses ancêtres paysans. Il accordait que la femme aimât, avec de la tendresse déférente plutôt qu’avec de l’abandon, mais jamais que l’homme lui fît sa soumission : l’homme devait être tel qu’il convient que le maître soit.

Odon aimait le violon, le sexe, l’histoire salée et le bock et, sans être paresseux, détestait la fatigue du travail.

Rose s’accommodait très bien de cette vie ; elle avait accepté son lot presque avec joie, n’ayant pas eu la conception d’une autre existence.

Elle vivait ainsi depuis dix ans dans le paisible