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Page:Garnir - À la Boule plate.djvu/36

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d’argent, avait été surprise par lui dans les bras d’un acrobate de la troupe. Elle s’était tuée en piste, le soir même : accident disaient les uns, suicide disaient les autres.

Charles, atteint au plus profond de lui-même, traîna de longs jours une vie empoisonnée de honte, de révolte et de douleur. Puis il s’était tiré, une nuit d’hiver, sur un banc de promenade publique, un coup de revolver qui lui avait troué la poitrine. On l’avait transporté à l’hôpital, où il mit trois mois à se guérir.

Après une longue convalescence, il avait liquidé le passé, rassemblé les débris de son avoir et s’était décidé, comme il disait, à vivre à la fortune du pot, au petit bonheur, frissonnant parfois encore d’un brusque rappel des heures mauvaises, en attendant, sans impatience et sans détresse maintenant, une occasion de reprendre du goût à la vie, de se refaire un sort.

Le milieu médiocre et heureux de « La Bonne Source », la gaieté bonne enfant de Flagothier, l’humeur souriante de la douce, paisible et belle Mme Rollekechik lui étaient reposants. Il apaisait ses souvenirs dans cette atmosphère, y lénifiait son ancienne blessure.

Pendant les nuits de fièvre qui avaient suivi le coup