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Page:Garnir - À la Boule plate.djvu/53

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l’arome des tabacs. Rose en fit la remarque. Périnet en profita pour expliquer comment il fallait cuire un « bistèque » : le laisser saignant, bien pris au-dessus, le beurre en dessous, le cresson très frais servi à part, car c’est un crime de laisser le beurre « se commettre avec le cresson ».

Comme Charles parlait peu, l’observant, Périnet, ainsi que Rose l’avait prévu, le prit pour un labbekak et soigna ses phrases. Pour être tout à fait séduisant et persuasif, il suçait les « r » comme des boules de gomme et faisait le geste du canari qui, après avoir pris du bec une goutte d’eau dans sa fontaine, renverse la tête et secoue le cou pour faire descendre la goutte dans son gosier.

Charles, plus agacé qu’amusé, contemplait curieusement ce phénomène, quand l’arrivée de Mme Cécile Laermans fit une diversion bruyante.

Trente-deux ans ; veuve. La tête, blonde et rose, était jolie et même fine ; le corps était monstrueux : une tour d’où la poitrine saillait comme une échauguette. Mme Cécile emplit, quand elle entra, le cadre de la porte. Et elle se montra tout de suite ce qu’elle était : aimable, bonne enfant avec une souriante autorité, et délicieusement bête.

D’un ton affable et sans y mettre de malice, elle