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Page:Garnir - À la Boule plate.djvu/68

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la Boule Plate était tenue par M. Alembert Picquet, un Bruxellois bruxellisant, très bas-de-la-ville, homme avisé, connaissant sa cave et soignant sa bière. Il avait la confiance, l’estime et même l’amitié de beaucoup de ses clients, car il était honnête, d’humeur égale et parfois de bon conseil.

Le bohème et le travail trinquaient ensemble à la Boule Plate ; les clients les plus dissemblables communiaient sous les espèces du demi et de la tartine au fromage ; c’était un lieu de détente, de trêve et de repos ; des gens qui se saluaient peu dans la rue, y échangeaient des mots aimables et des poignées de main.

L’une des trois salles dont se composait l’établissement — il y avait au fond un billard, mais on n’y allait guère ; le dimanche soir, le schamotteur des vieux staminets bruxellois venait y déballer ses tours et sa tombola — était, non pas formellement réservée, mais officieusement attribuée aux journalistes et à leurs amis. Les reporters-omnibus s’y communiquaient fraternellement leurs informations ; des bourgeois y rédigeaient, d’après les conseils des professionnels, des lettres de « lecteur assidu » qu’on envoyait aux journaux ; tels hommes politiques y venaient prendre langue ou inspirer des camarades rédacteurs. Il y avait « de tout là nedans », comme