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Page:Garnir - Le Commandant Gardedieu, 1930.djvu/116

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Le 28 juin. — Hier, à Bruxelles, j’ai été en guinse, dans des bars où, juchés sur des hauts tabourets, face au comptoir, des fils de famille trinquent avec des bookmakers opulents et grossiers. On a dansé au phonographe, c’est-à-dire qu’on s’est frictionné les abdomens, par couple, en se livrant au simulacre de la reproduction. La vue de ces adolescents mal polis, abrutis d’alcool et de tabac, méprisants, trop exténués pour prendre leur danseuse et peut-être même pour la désirer, la vue de ces cocottes que le danseur invite d’un clappement de langue à se coller à lui pour faire un tour de piste, la vue aussi des vieilles grosses femmes qui pâment leurs cent kilos de mauvaise graisse et de mauvaise viande entre les bras d’un « professeur » aux cheveux huilés et lui font des yeux blancs, noyés dans la berdouille fétide des onguents, toute cette débauche stupide en peau et en dentelles, toute cette « orgie » de grande ville m’est apparue d’une pâle tristesse. Quand, brusquement, la musique