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Page:Garnir - Le Commandant Gardedieu, 1930.djvu/93

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Le 12 mai. — Je suis mécontent de moi-même.

Je suis tout démoulquiné — au moral, bien entendu. Je suis scrand ; je ne sais plus ce que je veux ; qu’on me propose n’importe quoi, j’aime autant au beurre qu’à l’huile. Père de mon bataillon, je suis tenu, comme tel, de faire régner la concorde entre mes hommes… eh bien ! on est venu me demander tout à l’heure de raffiquer une querelle entre deux gardes dont l’un a fait l’autre cocu : c’est à peine si j’ai dit oui. Moi qui aime rire, je ne ris plus que quand le sel brûle.

À la dernière prise d’armes, il m’a semblé que je n’étais plus dans mon assiette, que je n’avais plus mon bataillon en mains comme je l’ai toujours eu jusqu’ici.

Je suis fier de mes chasseurs. Je le proclame partout où j’ai l’occasion de le proclamer. Pourtant, il y a, parmi eux, des têtes de bois… jamée ! Hier encore, au rassemblement sur la place, je vois arriver ce grand fade d’Alphonse Aribotte, traînant ses souliers comme si on l’avait chargé de polir les