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Page:Gaskell - Cousine Phillis.djvu/314

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à peu leur empire sur elle, à ce point qu’elle voulut revoir un à un les menus objets de ce trésor abrité dans la vieille écritoire, le morceau de batiste finement cousu, la boucle dorée de la petite sœur morte, la lettre commencée pour M. Corbet. Elle en relut les deux dernières lignes : « De mon lit, de mort, écrivait M. Wilkins, je vous conjure d’être pour elle un ami… je vous demanderai pardon pour tout ce dont vous avez à vous plaindre… »

— Emporterai-je ce papier ? se demanda-t-elle… Oui certes, et dût-il ne me servir à rien… ce qui est probable, après que je lui aurai révélé… Tout est si changé entre nous, si complètement anéanti, que je n’éprouverai aucune honte à ne lui rien déguiser de ma participation à cette espèce de crime… Et d’un autre côté, cette humble supplique de mon pauvre père doit l’amener à penser plus favorablement d’un homme qui, malgré leur désastreuse querelle, n’avait jamais cessé de lui être attaché…

Ses nerfs étaient si ébranlés par cette veillée pleine d’angoisse, qu’elle faillit s’écrier, une fois devant la porte du juge Corbet, au bruit du marteau que le cocher du cab faisait retentir à coups redoublés. Elle descendit à la hâte, avant que personne se fût dérangé pour ouvrir, paya double course à l’homme qui l’avait amenée, et attendit, tremblante, humble, le cœur malade, qu’on l’introduisît chez l’important magistrat.