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Page:Gautier - Œuvres de Théophile Gautier, tome 2.djvu/574

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heur de parler avec lui des attraits sans rivaux de sa femme.

Aussi le fit-il appeler et l’emmena-t-il dans la cour des Héraclides.

« Eh bien ! Gygès, lui dit-il d’un air riant, je ne t’avais pas trompé en t’assurant que tu ne regretterais pas d’avoir passé quelques heures derrière cette bienheureuse porte. Ai-je raison ? Connais-tu une plus belle femme que la reine ? Si tu en sais une qui l’emporte sur elle, dis-le-moi franchement, et va lui porter de ma part ce fil de perles, emblème de la puissance.

― Seigneur, répondit Gygès d’une voix tremblante d’émotion, nulle créature humaine n’est digne d’être comparée à Nyssia ; ce n’est pas le fil de perles des reines qui conviendrait à son front, mais la couronne sidérale des immortelles.

― Je savais bien que ta glace finirait par se fondre aux feux de ce soleil ! ― Tu conçois maintenant ma passion, mon délire, mes désirs insensés. ― N’est-ce pas, Gygès, que le cœur d’un homme n’est pas assez grand pour contenir un tel amour ? Il faut qu’il déborde et s’épanche ».

Une vive rougeur couvrit les joues de Gygès, qui ne comprenait que trop bien maintenant l’admiration de Candaule.

Le roi s’en aperçut, et dit d’un air moitié souriant, moitié sévère :

« Mon pauvre ami, ne va pas faire la folie d’être amoureux de Nyssia, tu perdrais tes peines ;