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Page:Gautier - Œuvres de Théophile Gautier, tome 2.djvu/581

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« C’est bien, répondit Nyssia, voici le moyen d’exécution. ― Et elle tira de son sein un poignard bactrien au manche de jade enrichi de cercles d’or blanc. ― Cette lame est faite non avec de l’airain, mais avec du fer difficile à travailler, trempé dans la flamme et dans l’onde, et telle qu’Héphaistos ne pourrait en forger une plus aiguë et plus acérée. Elle percerait comme un mince papyrus les cuirasses de métal et les boucliers recouverts de peau de dragon. ― Le moment, continua-t-elle avec le même sang-froid de glace, sera celui de son sommeil. Qu’il s’endorme et ne se réveille plus ! »

Son complice Gygès l’écoutait avec stupeur, car il ne s’était pas attendu à voir une semblable résolution dans une femme qui ne pouvait prendre sur elle de relever son voile.

« Le lieu de l’embuscade sera l’endroit même où l’infâme t’avait caché pour m’exposer à tes regards. ― À l’approche de la nuit, je renverserai le battant de la porte sur toi, je me déshabillerai, je me coucherai, et, quand il sera endormi, je te ferai signe… Surtout pas d’hésitation, pas de faiblesse, et que la main n’aille pas te trembler quand le moment sera venu ! ― Maintenant, de peur que tu ne changes d’idée, je vais m’assurer de ta personne jusqu’à l’heure fatale ; tu pourrais essayer de te sauver, de prévenir ton maître : ne l’espère pas ! »

Nyssia siffla d’une façon particulière, et aus-