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Page:Gautier - Œuvres de Théophile Gautier, tome 2.djvu/66

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Musidora. ― C’était Arabelle qui demandait à voir Musidora.

« Dites-lui qu’elle entre, » fit Musidora en soulevant son corps de manière à le ramener du fond de l’eau à la surface, pour que ses perfections submergées ne fussent plus séparées du regard que par une mince couche de cristal ; car elle savait qu’Arabelle avait dit qu’elle était maigre, et elle n’était pas fâchée de lui donner un éclatant démenti. ― En effet, Musidora, par un privilège spécial à ces vivaces organisations, avait à la fois les formes très frêles et très potelées.

« Eh bien ! divine, comment allez-vous ? dit l’Arabelle en embrassant la Musidora.

― Passablement ; ― ma santé devient bonne ; depuis quelque temps j’engraisse. Et la vindicative petite fille se souleva encore davantage ; ― les pointes de sa gorge et un de ses genoux sortirent tout à fait de l’eau. ― N’est-ce pas ? à me voir habillée, l’on me dirait plus maigre ? continua-t-elle en fixant ses yeux de chatte sur l’Arabelle, qui ne put s’empêcher de rougir un peu.

― Sans doute, vous êtes grasse comme un petit ortolan roulé dans sa barde de lard. ― C’est une charmante surprise que vous gardez là à vos favorisés. ― On est ordinairement trompé en sens inverse. ― Mais vous ne savez ce qui m’amène ?