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LES CONCOURS DE 1837

dire à ton maître que tu as vu Marius sur les ruines de Carthage ! » Où bien le fameux vers :

Et ces deux grands débris se consolaient entre eux.

Cela rappelle les peintres du moyen âge qui écrivaient, à côté des objets qu’ils ne pouvaient suffisamment caractériser, pulcher homo ou currus venustus.

Huit élèves ont été admis au concours. Voici leurs noms dans l’ordre de la réception ce sont MM. Cavalier, Gruyère, Vilain, Robinet, Chambard, Diebolt, Rochet et Pascal. Dire lequel de ces messieurs doit l’emporter sur les autres serait une chose difficile ; on peut seulement affirmer sans crainte qu’ils sont tous d’une médiocrité non d’or, mais de plomb ; il faut parcourir plusieurs fois cette ligne de terre grise, d’un aspect triste et froid, pour apercevoir la plus légère différence entre une composition et l’autre.

Presque tous ces Marius, puisque c’est Marius que cela se nomme, ont les mines les plus féroces et les plus rébarbatives du monde ; ils froncent les sourcils, se mordent les lèvres, tendent leurs muscles à les rompre et montrent des figures plus rechignées qu’Atlas à qui l’entablement du ciel meurtrit les épaules. Il me semble qu’un homme qui songe n’a pas besoin de déployer un aussi formidable appareil de musculature ; le propre de la pensée est de dé-