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Page:Gautier - La Chanson de Roland - 1.djvu/331

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LA CHANSON DE ROLAND


CXIII


Par le milieu d’une vallée s’avance le roi Marsile,
Avec la grande armée qu’il a réunie
Et divisée en vingt colonnes.
Au soleil reluisent les pierreries et l’or des heaumes,
Et les écus et les hauberts brodés.
Sept mille clairons sonnent la charge.
Quel bruit dans toute la contrée !
« Olivier, mon compagnon, s’écrie Roland, mon frère Olivier,
« Le traître Ganelon a juré notre mort,
« Et sa trahison n’est ici que trop visible.
« Mais l’Empereur en tirera une formidable vengeance.
« Quant à nous, nous aurons une forte et rude bataille :
« Car on ne vit jamais telle rencontre.
« J’y vais frapper de mon épée Durendal ;
« Vous, compagnon, vous frapperez de votre épée Hauteclaire.
« Nous les avons déjà portées en tant de lieux !
« Nous avons avec elles gagné tant de victoires !
« Il ne faut pas qu’on chante sur elles de méchantes chansons. »


CXIV


Quand nos Français voient qu’il y a tant de païens,
Et que la campagne en est couverte de toutes parts,
Ils appellent à leur aide Olivier et Roland
Et les douze Pairs pour leur servir de rempart.
L’Archevêque alors leur dit sa façon de penser :
« Pas de lâcheté, seigneurs barons.
« Au nom de Dieu, ne fuyez pas,
« Et qu’on ne puisse pas faire contre nous de mauvaises chansons.
« Il vaut bien mieux mourir en combattant.