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Page:Gautier - La Chanson de Roland - 1.djvu/543

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LA CHANSON DE ROLAND

« Eh bien ! laisse ce combat :
« Je t’accorderai avec Charles.
« Quant à Ganelon, on en fera si bonne justice
« Que jamais plus on n’en entendra parler.
« — Ne plaise au Seigneur Dieu ! répond Pinabel ;
« J’entends bien soutenir toute ma parenté,
« Et devant homme mortel je ne reculerai pas.
« Plutôt mourir que de mériter un tel reproche ! »
Alors ils recommencent à échanger de grands coups d’épée
Sur leurs heaumes gemmés d’or.
Le feu clair en jaillit, et vole jusqu’au ciel.
On ne les pourrait plus séparer :
Ce duel ne finira pas sans homme mort.


CCXCI


C’est un vaillant homme que Pinabel de Sorence.
Il frappe Thierry sur son écu provençal :
Le feu en jaillit, qui enflamme l’herbe sèche.
Il présente à son adversaire la pointe de son épée d’acier,
Lui tranche le heaume sur le front,
Et lui fait descendre la lame jusqu’au milieu du visage ;
La joue droite est tout en sang,
Le haubert déchiré jusqu’au ventre.
Mais Dieu est là qui préserve et garantit Thierry.


CCXCII


Thierry voit qu’il est blessé au visage :
Le sang tout clair coule sur le pré herbu.
Alors il frappe Pinabel sur le heaume d’acier bruni,
Dont il fait deux morceaux jusqu’au nasal.
Toute la cervelle de sa tête se répand à terre.