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Page:Gautier - La Conquête du paradis.djvu/405

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parla de fuir vers Pondichéry. Dupleix, par de prodigieux efforts, atténua un peu le désastre, put tenir dans Hyderabad, et je crois que le capitaine Kerjean a reçu des ordres secrets ; c’est lui qui dirige tout, depuis que la maladie du général, prenant des allures mortelles, nous obligea à l’amener ici, espérant quelque soulagement des fraîches brises de la mer.

Arslan-Khan, la tête dans ses mains, sanglotait.

— Qui le soigne ? demanda-t-il.

— Le médecin du roi est ici, il ne l’a pas quitté, dit Naïk, mais il s’avoue impuissant et ne peut découvrir quel est le poison qui tue lentement un homme si jeune et si robuste. Une fièvre terrible le brûle sans relâche, lui donne des accès de fureur, des colères folles où il retrouve des forces pour tout briser ; mais ces crises cessent depuis quelques jours pour faire place à un délire plus calme, à des craintes d’enfant et à des somnolences funestes qui, au dire du médecin, annoncent la fin.

— Ah ! je le vengerai ! s’écria Arslan, j’en fais le serment sacré, je saisirai ce misérable brahmane et j’inventerai pour lui des douleurs atroces. Je ferai durer son agonie des jours et des mois, je le tuerai lambeau à lambeau. Mais, hélas ! tout son sang impur ne rachètera pas une goutte de celui de notre ami !

— Le maître est éveillé, dit un serviteur qui apparut et disparut aussitôt.

— Crois-tu qu’il me reconnaîtra ? demanda Arslan, qui entra en tremblant dans la chambre.