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Page:Gautier - La sœur du soleil.djvu/39

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d’or de forme oblongue, posée sur la tête de Fidé-Yori, le fait reconnaître de loin.

Bientôt le cortège religieux vient défiler lentement devant le siogoun. Puis les prêtres qui portent la chàsse quittent la file et s’approchent tout près de la mer.

Alors les pêcheurs, les bateliers du rivage accourent soudain avec des cris, des sauts, des gambades, et se jettent sur ceux qui portent Yébis. Ils simulent une bataille en poussant des clameurs de plus en plus aiguës. Les prêtres feignent de se défendre, mais bientôt la chàsse passe de leurs épaules sur celles des robustes matelots. Ceux-ci, alors, avec des hurlements de joie, entrent dans la mer et promènent longtemps, au-dessus des flots limpides, leur dieu bien-aimé, tandis que des orchestres, portés par les jonques qui sillonnent la mer, font éclater leurs mélodies joyeuses. Enfin les matelots reviennent à terre, au milieu des acclamations de la foule, qui se dissipe bientôt pour retourner en toute hâte à la ville, où bien d’autres divertissements s’offrent encore à elle : spectacles en plein air, ventes de toutes sortes, représentations théâtrales, banquets et libations de saké.

Fidé-Yori quitte la plage à son tour, précédé par les deux coureurs et suivi de son cortège. On s’engage dans une petite vallée fraîche et charmante, et l’on prend un chemin qui, par une pente très douce, conduit au sommet de la colline. Ce chemin est complètement désert. D’ailleurs, depuis la veille, on en a interdit l’accès au peuple.

Fidé-Yori songe au complot, au pont qui doit s’écrouler et le précipiter dans un abîme. Il y a pensé toute la nuit avec angoisse ; mais, sous ce soleil si franchement lumineux, au milieu de cette nature paisible, il