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Page:Gautier - Quand on voyage.djvu/183

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dépasse tout ce qui se peut imaginer comme accident de forme, de lumière et de couleur.

Nous songions aussi à notre excursion en Kabylie, à ces montagnes dorées par le soleil d’Afrique, à ces vallées pleines de lauriers-roses, de mimosas, d’arbousiers, de lentisques où filtraient des ruisseaux habités par de petites tortues, à ces villages kabyles entourés de palissades de cactus et à ces horizons d’une dentelure si variée que dominait toujours l’imposante silhouette du Djurdjura, et véritablement l’Apennin nous paraissait médiocre, malgré sa réputation classique.

Nous ne voudrions pas nous adonner à ce fameux paradoxe marseillais qui consiste à dire : « On gèle en Afrique, on brûle en Russie. » Pourtant, nous devons avouer que nous grelottions de froid à notre poste aérien, malgré une superposition de paletots et de cabans à faire envie à Méry, le frileux poète. Jamais à Paris, pendant l’hiver le plus rigoureux, nous ne nous sommes revêtu simultanément d’une pareille quantité de hardes, et cependant nous n’étions qu’à la mi-septembre, une saison qu’on a l’habitude de croire tiède et charmante sous le doux ciel de la Toscane : il est vrai que l’élévation du terrain rafraîchit l’air, et que le