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Page:Gautier - Quand on voyage.djvu/79

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de la montagne, nous fîmes un copieux déjeuner dans un cabaret établi à la même place qu’une des anciennes hôtelleries dont nous venons de citer les enseignes, mais ayant perdu, pour se mettre au niveau du progrès, toute physionomie moyen âge, défaut qu’il rachète par la bonté de sa cuisine.

L’usage est de commencer la visite du mont Saint-Michel par une promenade sur les remparts, magnifique échantillon de l’art militaire au temps de la féodalité. Ces travaux de défense consistent en une épaisse muraille bordée de mâchicoulis, et relevée de distance en distance par des tours rondes. Le rempart et les tours plongent dans la mer ou portent sur la grève selon l’heure ; puis, quand ils rencontrent la roche, ils s’élèvent avec elle en suivant les anfractuosités du terrain et se rattachent à cette immense muraille haute de cent pieds, longue de deux cent trente, qu’on nomme la Merveille, qui abrite trois zones d’édifices superposés et fait de l’abbaye un monument sans rival. Les tours ont chacune leur dénomination. Ce sont, en allant du sud au nord : la tour du Roi, avec son élégante échauguette ; l’Escadre, coiffée d’un toit en éteignoir ; la tour de la Liberté ; la tour Basse ; la tour Boucle, où s’accrochent des anneaux de fer pour amarrer les navires ;