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Page:Gautier - Spirite (Charpentier 1886).djvu/213

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bien de partir pour la Grèce, comme il l’a annoncé hier au club. Dixi. »

Le valet de pied appelant la voiture de Mme la comtesse mit fin à cette conversation, et plus d’un jeune homme éprouva le péché d’envie en voyant d’Aversac monter après Mme d’Ymbercourt dans le grand coupé, dont la portière fut refermée sur lui par le laquais, remonté sur le siège en un clin d’œil. La voiture partit grand train. D’Aversac, à moitié recouvert par des flots de satin, si près de cette femme, aspirant le vague parfum qui s’en exhalait, tâcha de profiter de ce court tête-à-tête pour dire à la comtesse quelques mots d’une galanterie un peu plus tendre. Il fallait trouver sur le champ quelque chose de décisif et de passionné, car il n’y a pas loin de la place Ventadour à la rue de la Chaussée-d’Antin ; mais l’improvisation n’était pas le fort du rival de Guy. Mme d’Ymbercourt, il faut le dire, ne l’encourageait guère ; silencieuse, blottie dans l’angle du coupé, elle mordillait le coin de son mouchoir bordé de dentelle.

Pendant que d’Aversac s’efforçait de mener à fin une phrase laborieusement amoureuse, Mme d’Ymbercourt, qui n’en avait pas écouté un mot, tout occupée à suivre sa propre pensée, lui prit brusquement le bras et lui dit d’une voix brève : « Est-ce que vous connaissez la nouvelle maîtresse de M. de Malivert ? »