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Page:Gautier - Tableaux de Siége.djvu/161

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Notre ami posa le morceau sur un pavé et s’éloigna discrètement. Alors la bête happa le pain après avoir franchi l’espace d’un bond prodigieux, et se sauva à une grande distance avec une vitesse de lévrier pour aller dévorer sa proie en lieu de sûreté.

Après le tour des chiens et des chats vint celui des oiseaux. L’ornithologie de Paris n’est pas bien riche. On n’y voit guère que des moineaux, et dans les vieux jardins des quartiers tranquilles quelques merles et quelques rossignols. Les pierrots, – c’est ainsi qu’on les nomme vulgairement – gamins ailés, vrais Gavroches de gouttières, sont aimés des Parisiens et jouissent par la ville d’immunités pareilles aux privilèges des pigeons de Saint-Marc : si on ne leur distribue pas de la graine à certaines heures, s’ils n’ont pas de rentes comme les oiseaux de Venise, on les laisse picorer effrontément partout, et les charmeurs leur jettent de la mie de pain aux Tuileries ; ils vont, ils viennent, voletant, piaillant, ne partant que lorsqu’on va mettre le pied dessus ; leur caquet met de la gaieté dans l’air. Leur innocente vie a jusqu’à présent été respectée de tous. Ils n’ont pas, d’ailleurs, grand’chair sous leur