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Page:Gautier - Tableaux de Siége.djvu/200

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limpidité incomparables. Le peintre, tout en maintenant sa volonté, a su profiter admirablement des heureux hasards de l’aquarelle.

Mentionnons aussi quelques portraits au crayon pleins d’esprit et de vérité, entre autres un portrait de jeune fille à cheval, d’une grande élégance, et qui montre chez le jeune artiste des aptitudes qui rappellent Géricault.

Voilà ce qu’il laisse ; mais nous savons par son ami Clairin ce qu’il rêvait et ce qu’il allait accomplir : une sorte de personnification et de triomphe de l’Islam au temps des califes d’Espagne. Il faisait bâtir à Tanger un immense atelier pour y mettre son projet à exécution. La toile devait avoir dix mètres de long sur une hauteur proportionnée — quelque chose comme l’un des grands festins de Paul Véronèse ; — on la cousait déjà.

Avant de se mettre à une œuvre, Regnault, par une intuition rapide, la voyait réalisée et il la racontait avec une grande abondance de détails, semblable en cela à ces personnages hallucinés d’Hoffmann et de Balzac, pour qui une toile blanche représentait un chef-d’œuvre invisible aux autres spectateurs. Mais il y avait entre lui