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Page:Gautier - Tableaux de Siége.djvu/289

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lentes. Il en résulte une impression de grandeur, d’ordonnance et de beauté à laquelle personne ne peut se soustraire. Versailles reste toujours sans rival au monde : c’est la formule suprême d’un art complet et l’expression à sa plus haute puissance, d’une civilisation arrivée à son entier épanouissement.

Quand, sous Louis XVI, on replanta le jardin, le goût avait changé. Le citoyen Rousseau de Genève avait découvert la nature ; les idées anglaises envahissaient le continent, la mode était aux « jardins paysagistes, » c’est-à-dire aux terrains montueux, aux massifs d’arbres non taillés, aux allées sinueuses, aux vertes pelouses, aux eaux plates traversées de ponts rustiques, aux grottes factices, aux ruines artificielles, aux chaumières renfermant des automates qui se livraient aux travaux de la campagne. En admirant ces belles choses, on montrait qu’on avait l’âme sensible, une grande prétention de l’époque, et la pensée dut venir de refaire le jardin dans le genre moderne.

On se moquait déjà fort agréablement des allées tirées au cordeau, des charmilles tondues, des parterres encadrés de buis et dessinant des