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Page:Georges Eekhoud - Escal-Vigor.djvu/104

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ESCAL-VIGOR

ment bibliophilique. Le médecin étudia longuement le jeune homme, à la faveur d’une causerie sur la littérature à base scientifique.

Ayant revu la comtesse, le docteur diagnostiqua une irritabilité nerveuse dont ils s’ingénièrent vainement à découvrir la cause. À tout hasard, il prescrivit un régime hydrothérapique, la natation, l’escrime, le patinage, le cheval, et déclara, au surplus, n’avoir découvert chez le sujet, aucune lésion organique, aucune tare morbide. Au contraire, il prétendit n’avoir jamais rencontré plus souple intelligence, jugement aussi sain, pareille élévation de vues dans une nature plus vibrante ; et il finit par féliciter l’aïeule, en disant avec cette rude bonhomie professionnelle : « Madame, ou bien je suis une parfaite ganache, ou ce jeune exalté fera honneur à votre nom. Il a du génie, votre petit-fils ; il est de la trempe de ceux chez qui l’avenir recrute les artistes, les conquérants ou les apôtres ! » — « Que n’est-il plutôt de la trempe des élus du bonheur ! » soupira la douairière, peu ambitieuse, mais sensible pourtant à ces prédictions de gloire.