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Page:Georges Eekhoud - Escal-Vigor.djvu/106

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ESCAL-VIGOR

à un dog-car prenait ombrage d’une brouette de maçon abandonnée au milieu de la rue, et, après un écart effrayant, se livrait à une course frénétique sur le square planté d’arbres, jusqu’à ce qu’il allât se jeter, avec la voiture, contre un réverbère. Kehlmark et son groom furent culbutés croupe par-dessus tête, mais se remirent aussitôt sur leurs pieds sans une égratignure. Le cheval sortait indemne de la collision. Quant à la voiture, défoncée et tordue, un badaud, appâté par une gratification, se chargea de la rouler jusque chez le carrossier. Un commerçant du quartier s’empressa de mettre son cheval et sa voiture à la disposition de M. de Kehlmark. La nuit allait tomber, la douairière attendait Henry pour le dîner, et il était loin du logis. Le groom attira l’attention de son maître sur l’extrême excitation du cheval, qui pointait des oreilles et s’ébrouait encore tout frémissant, et lui conseilla d’accepter l’offre de ce bourgeois. Mais le comte ne consentit à emprunter que la voiture. La trop ardente bête fut attelée à la voiture du notable. Kehlmark reprit les rênes, le groom monta sur le siège non sans rechigner. Contre leur attente, le cheval semblait calmé et prit une allure normale.