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Page:Georges Eekhoud - Escal-Vigor.djvu/114

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ESCAL-VIGOR

d’un intendant, d’un administrateur pour s’occuper de vos affaires, gérer votre fortune, diriger votre maison… Vous entretenez de trop radieuses, de trop nobles idées pour vous tracasser à tous ces détails prosaïques et matériels. Compter, chiffrer, n’est pas votre fait ; moi, c’est ma vie… Je ne connais même que ça ! Allons, monsieur l’artiste, (elle se faisait adorablement câline) un bon mouvement, ne me renvoyez pas cette fois-ci ; consentez à me maintenir dans l’emploi que je remplissais chez la comtesse… Si elle était ici, elle-même intercéderait pour moi… À moins que vous ne songiez à vous marier ?

— Me marier ! se récria-t-il. Moi, me marier !

Impossible de se méprendre à l’intonation de ces paroles. Le comte de Kehlmark devait être en effet réfractaire à tout pacte conjugal.

Blandine parvint à peine à dissimuler sa joie ; du rire traversait ses larmes.

— Eh bien, Henry, dans ce cas je ne vous quitte plus. Qui tiendra votre grand château là-bas ? Qui prendra soin de vous ? Est-il quelqu’un qui connaisse vos goûts mieux que moi et qui mette autant de sollicitude à les flatter ? Non, Henry, la séparation est impossible… Vous ne pouvez pas