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Page:Georges Eekhoud - Escal-Vigor.djvu/250

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ESCAL-VIGOR

plaisir à dépister, à frustrer les chasseresses goulues.

Malheur au traînard, à l’isolé : il paie pour les autres.

Malheur même au profane ou à l’étranger qu’elles abordent ; il est sommé de faire son choix ou de suivre, de servir celle à qui le sort l’adjuge. De sinistres histoires défraient depuis longtemps le répertoire des chanteurs de complaintes et ce n’est point le seul Olfgar qui fut victime de la luxure des lices de Smaragdis.

Henry de Kehlmark n’ignorait point ces traditions violentes. Aussi, quelque friand qu’il fût de déduits originaux, il avait toujours évité de sortir cette après-midi de kermesse. C’était même la seule fête publique, la seule tradition locale qu’il boudât. On lui avait passé jusque-là cette abstention en raison des excès et de l’énormité même de cette saturnale. Un si haut personnage ne pouvait décemment se commettre avec ces énergumènes. Ce jour-là, les filles honnêtes aussi se claquemuraient chez elles, de même les jeunes époux et les fiancés, partisans d’effusions moins incendiaires.