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Page:Georges Eekhoud - Escal-Vigor.djvu/30

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ESCAL-VIGOR

telles sous des chapeaux coniques à larges brides, des corsages plus historiés, aux arabesques encore plus fantastiques que les gilets des hommes, des jupes bouffantes du même velours et du même ton mordoré que les vestes et les culottes ; des jaserans ceignant trois fois leur gorge, des pendants d’oreille d’un dessin antique quasi byzantin et des bagues au chaton aussi gros que celui d’un anneau pastoral.

C’étaient pour la plupart de robustes spécimens du type brun, de cette ardente et pourtant copieuse race de Celtes noirs et nerveux, aux cheveux crépus et en révolte. Paysans et marins hâlés, un peu embarrassés au début du repas, avaient vite recouvré leur assurance. Avec des gestes lourds mais non empruntés, et même de ligne souvent trouvée, ils se servaient du couteau et de la fourchette. À mesure que le repas avançait, les langues se déliaient, des rires, parfois un juron, scandaient leur idiome guttural, haut en couleur avec, pourtant, des caresses et des veloutés inattendus.

Logique dans sa dérogation à l’étiquette, violant toute préséance, l’amphitryon avait eu le bon esprit d’asseoir chaque fois à côté d’un de ses pairs de l’oligarchie une fermière, une patronne