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Page:Georges Eekhoud - Escal-Vigor.djvu/60

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ESCAL-VIGOR

mière des Pèlerins ! Son père se remaria et, pour combler le malheur de la petiote, seule enfant du premier lit, il mourut après lui avoir donné quantité de frères et sœurs. La marâtre de Blandine l’excédait de travail et de coups. Elle fut courageuse et stoïque, vraie bête de somme : non seulement elle aida sa seconde mère dans les besognes du ménage, s’occupa de débarbouiller, de veiller et de soigner ses puînés, mais elle travaillait au potager, gardait les vaches, se rendait toutes les semaines à pied au marché de la ville, chargée de jarres à lait et de mannes de légumes.

Par la suite, souvent aux heures de solitude, penchée sur un ouvrage de couture, Blandine devait évoquer la contrée natale et, notamment, la chaumière paternelle.

Celle-ci s’encapuchonne de joubarbe et de mousse ; les murs effrités dissimulent leurs lézardes derrière l’enchevêtrement du chèvre-feuille et de la vigne folle. Dans la cour, des porcs s’ébattent près du fumier, entre des poules qu’ils effarent et des pigeons blancs qui s’envolent sur le toit avec ce frou-frou plaintif que font leurs ailes ; un chien noir, à poil ras, de la race des spits, à la fois gardien vigilant et solide bête de trait, bâille dans