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Page:Georges Eekhoud - Escal-Vigor.djvu/65

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ESCAL-VIGOR

Souvent les journaliers d’une même paroisse, les salariés de petits paysans, empruntent un char à foin à un gros fermier et se cotisent pour la location des chevaux. Toutes les équipes : batteurs en grange, vanneurs, aoûterons, vachères, faneuses, prennent place sur le chariot, transformé en un verger ambulant, où les faces rouges et joufflues éclatent dans les branches comme des pommes rubicondes.

L’émouchette caparaçonne les forts chevaux, car les taons font rage le long des chênaies ; mais les mailles du filet disparaissent sous les boutons d’or, les marguerites et les roses. Des cavalcades se forment. Les voitures se rendant aux mêmes villages, ou revenues des mêmes clochers, cahotent à la file, trimbalent de compagnie leur nouvelle légion de servantes.

Défilé éblouissant et tapageur, apothéose des œuvres de la glèbe par ses affiliés. Sur leur passage, l’air vibre de parfum, de lumière et de musique !

Bouviers et garçons de charrue, le sarrau bleu festonné d’un ruban écarlate, la casquette ceinte d’un rameau feuillu, une branche pour aiguillon, précèdent le cortège en manière de postillons, ou caracolent sur les accotements ; d’aucuns affour-