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Page:Germain - Œuvres philosophiques, 1896.djvu/220

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Képler[1] avait de modiques pensions ; il vivait dans ces temps malheureux où l’on ne les lui payait pas. Il fallait faire des voyages pour des sollicitations ; il perdait le temps toujours bien cher au génie, et il usait son âme et ses forces par l’inquiétude. C’est bien assez des efforts de l’invention pour consumer la vie ; l’homme ne crée qu’aux dépens de la force qui le fait exister. C’était trop d’y ajouter le chagrin qui mine sourdement cette existence. Voilà donc le sort des grands hommes : la gloire et la pauvreté. Leur gloire n’intéresse qu’eux, l’utilité souvent très grande de leurs inventions, est éloignée. On ne paie bien que les services présents. Pour avoir le courage de reculer les bornes des sciences, il faut s’isoler de tout intérêt, et vivre dans l’avenir qui rend toujours justice. Mais, quand à du génie on joint une âme sensible, on s’afflige pour les siens, pour des êtres chéris qui

  1. J. Képler, astronome, né en 1571 à Magstatt (Wurtemberg) et mort à Ratisbonne en 1630.