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Page:Germaine de Stael - Lettres et pensées du maréchal prince de Ligne, Paschoud, 1809.djvu/143

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Au Prince de Kaunitz, au mois de novembre 1788.


A Jassy.


J’AI reçu bien à propos, mon Prince, l’ordre que vous m’avez donné de me plaindre de la conduite des émissaires ou commissaires russes vis-à-vis des Monténégrins. On commençoit à nous blâmer, avec raison ; mais il y a toujours plus de finesse d’une part que de l’autre. Les Russes que Pierre I, à force de barbarie, a voulu civiliser, et qu’il a fait battre et tuer pendant neuf ans pour leur apprendre à vaincre, ce qu’ils savoient avant lui, ces Russes sont tout aussi malins que jamais. Cette manière de dégoûter des Autrichiens les Albanois, et tous leurs voisins, est très-dangereuse ; car de grecs en grecs on s’approche de la Hongrie.

Un officier du génie, que je ne nommerai pas à V. A., chargé de sommer le bacha de Choczim, lui a dit devant sa garnison : Méfiez-vous des Russes ; ne vous rendez point à eux, et dépêchez-vous de vous rendre au prince de Cobourg ; car les Russes ont dit qu’ils violeroient vos femmes et déchireroient vos entrailles. J’ai bien juré que cela n’étoit pas