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Page:Germaine de Stael - Lettres et pensées du maréchal prince de Ligne, Paschoud, 1809.djvu/168

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Ce 15 Février 1788.


Point de nouvelles depuis le commencement de ma lettre, que j’envoie enfin, car il ne me paroît pas que les Tartares qu’on nous annonce toujours arrivent jamais ; mais en revanche il nous est arrivé de Paris un prince de Nassau qui vous a détartarisé, en engageant votre M. de Montmorin à retirer M. de la Filte, et à changer le système protecteur de la France en faveur des Turcs. Sa ténacité en négociation, comme au coup de fusil, lui vaudra toujours des succès. Sa réputation, sa considération, et la logique qu’il sait, sans avoir eu le tems de l’étudier, ont bien servi vos désirs dans cette occasion importante.

Ne l’ai-je pas vu avant-hier, sabre en main, me sauver la vie ? Il n’est jamais deux jours comme un autre ; voici le fait. Je me remettois de quelques accès de fièvre, car heureusement ici nous n’avons point de médecin : on me dit qu’il y avoit du soleil ; c’étoit lui que j’attendois pour ma guérison. Nassau guide mes pas hors de la triste forteresse, grande comme la main ; mes gens me portent sur leurs bras, et me couchent sur l'herbe. Je m’endors aux premiers rayons du soleil. Un serpent à qui ces mêmes rayons redonnoient la vie, aussi bien