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Page:Germaine de Stael - Lettres et pensées du maréchal prince de Ligne, Paschoud, 1809.djvu/187

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Je vois des Russes à qui l’on dit : soyez cela, et qui le deviennent ; qui apprennent les arts libéraux comme le médecin malgré lui a fait ses licences ; qui sont fantassins, matelots, chasseurs, prêtres, dragons, musiciens, ingénieurs, comédiens, cuirassiers, peintres et chirurgiens.

Je vois des Russes qui chantent et dansent dans la tranchée, où ils ne sont jamais relevés, et au milieu des coups de fusil et de canon, de la neige ou de la boue ; adroits, propres, attentifs, respectueux, obéissans, et cherchant à lire dans les yeux de leurs officiers ce qu’ils veulent ordonner, pour les prévenir.

Je vois des Turcs qui passent pour n’avoir pas le sens commun à la guerre, et qui la font avec une espèce de méthode, éparpillés pour que l’artillerie et le feu des bataillons ne puissent pas être dirigés sur eux ; visant à merveille, et tirant toujours sur des objets réunis ; dissimulant par cette tiraillerie leurs espèces de manœuvres, cachés dans tous les ravins, les creux, ou sur des arbres, ou bien s’avançant au nombre de 40 ou 50 avec un drapeau qu’ils courent vite planter en avant, pour gagner du terrain : ils font tirer les premiers le genou en terre, ils les font aller en arrière recharger leurs armes, et se succéder sans cesse ainsi, jus-