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Page:Germaine de Stael - Lettres et pensées du maréchal prince de Ligne, Paschoud, 1809.djvu/316

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son talent pour l’épigramme qu’il penche trop peut-être, en écrivant, du côte opposé. Il a l’air de prodiguer des louanges pour empêcher la satire d’éclore ; mais leur excès les rend suspectes. Il est impossible d’être meilleur ni plus spirituel ; mais chez lui ces deux qualités ont peu de communication entr’elles, et si son esprit n’a pas toujours de la bonté, quelquefois aussi sa bonté pourroit manquer d’esprit.

M. de B… terminera sa carrière comme il l’a commencée, en étant le plus heureux et le plus aimable des hommes. Comment ne le seroit-il pas ? il est trop supérieur pour avoir des prétentions. Il n’est ni sur la ligne ni sur le chemin de qui que ce soit au monde. On rend sans peine justice à son talent, qui est unique dans ses pièces de vers, dans ses couplets ; chaque mot est un trait : il est surtout admirable quand on ne le croit que négligé. M. de B a plu sans qu’on sache comment ; mais c’est par la grâce, le goût, et un certain abandon, qui fait qu’il ne ressemble qu’à lui.

Enfin, après avoir eu tous les mécomptes d’un esprit supérieur et d’un cœur ami du bien, on dit qu’il s’occupe d’agriculture et de métaphysique, deux honorables retraites, où si l’on peut encore être trompé, ce n’est plus du moins par les hommes.