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Page:Gervaise de Latouche - Histoire de Dom Bougre, Portier des Chartreux,1922.djvu/94

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nous en donnerons à cœur-joie ; nous n’aurons pas d’espions à c’t’heure-là.

Je l’assurai que je m’y trouverais. La réflexion me fit résister à mon envie et aux prières de Martin, qui voulait que nous fissions cela encore une petite fois, disait-il, avant que de nous quitter. Mon refus l’aurait plongé dans la tristesse, si je ne l’eusse consolé par l’espérance du lendemain. Nous nous embrassâmes, je rentrai dans le couvent et je regagnai heureusement ma chambre sans avoir été aperçue.

Tu devineras facilement que je mourais d’impatience de me visiter et de savoir en quel état j’étais après les assauts que je venais d’essuyer. Je sentais une vive cuisson ; à peine pouvais-je marcher. J’avais pris une lumière au dortoir ; je tirai bien mes rideaux pour n’être vue de personne, et, m’étant assise sur ma chaise, une jambe sur mon lit et l’autre sur le plancher, je fis mon examen. Quelle fut ma surprise lorsque je trouvai que mes lèvres, qui étaient auparavant si fermes et si rebondies, étaient devenues toutes molles et comme flétries ! Les poils qui les couvraient d’espace en espace, quoiqu’ils se ressentissent encore de l’humidité, formaient mille petites boucles. L’intérieur était d’un rouge vif et enflammé, il était d’une sensibilité extrême. La démangeaison m’y faisait porter le doigt et, sur-le-champ, la douleur me forçait de le retirer. Je me frottais contre les bras de mon fauteuil et je le couvrais des marques de la vigueur de Martin. Le plaisir combattait contre la fatigue ; mais mes yeux s’appesantissaient insensiblement. Je me couchai et je dormis d’un sommeil qui ne fut interrompu que par des songes charmants qui me rappelaient les délices que j’avais goûtées.