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Page:Gervaise de Latouche - Le Portier des Chartreux, 1889.djvu/104

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Tout était calme chez Mme Dinville. Je ne trouvai personne sur mon passage, ce qui me fit traverser plusieurs appartements. Je n’entrais dans aucun sans sentir mon cœur agité par l’espoir de voir Suzon et la crainte de ne pas la trouver. Elle sera dans celui-ci, disais-je ; Ah ! je vais la voir : personne ; dans un autre de même. J’arrivai ainsi jusqu’à une chambre dont la porte était fermée, mais la clef y était. Je n’étais pas venu si loin pour reculer, j’ouvris ; ma hardiesse fut un peu déconcertée à la vue d’un lit où je jugeai qu’il devait y avoir quelqu’un couché. Je me retirais, quand j’entendis une voix de femme demander qui c’était, et en même temps je reconnus Mme Dinville. Je me disposais à sortir, mais sa gorge m’en ôta le pouvoir. — Eh ! c’est mon ami Saturnin, s’écria-t-elle ; viens donc m’embrasser, mon cher enfant. Aussi hardi après ces paroles que j’étais timide auparavant, je me précipitai dans ses bras. J’aime, me dit-elle d’un air de satisfaction, après m’être acquitté d’un devoir où le cœur avait eu plus de part que la politesse, j’aime qu’un jeune garçon obéisse ponctuellement. À peine eut-elle achevé ces mots que je vis sortir d’un cabinet de toilette un petit homme à figure minaudière qui écorchait d’un ton de fausset l’air d’une chanson nouvelle alors ; il en marquait la cadence par des pirouettes qui répondaient à merveille aux bizarres accents de sa voix. À la brusque apparition de cet Am-