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Page:Gervaise de Latouche - Le Portier des Chartreux, 1889.djvu/112

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L’abbé s’étant retiré, nous nous trouvâmes au bout de l’allée. Mme Dinville gagna un petit bosquet dont la fraîcheur nous promettait une promenade charmante, si nous y restions. Je le lui dis. — Soit, me répondit-elle, en cherchant à pénétrer dans mes yeux si je n’étais pas au fait du motif de sa promenade. Elle n’y vit rien. Je ne m’attendais pas au bonheur qui m’était préparé. Elle me serrait affectueusement ; et, penchant sa tête près de mon épaule, approchait son visage si près du mien que j’aurais été un sot si je n’y eusse pris un baiser, on me laissa faire, je réitérai ; même facilité, j’ouvris les yeux. Oh ! pour le coup, dis-je, c’est une affaire faite ; nous n’aurons pas ici d’importuns. Ayant pénétré ma pensée, nous nous engageâmes dans un labyrinthe dont l’obscurité nous dérobait aux yeux des plus clairvoyants. Elle s’assit à l’abri d’une charmille ; j’en fis autant, et me mis à côté d’elle. Elle me regarda, me serra la main et se coucha. Je crus que l’heure du berger allait sonner, et déjà je préparais l’aiguille, quand tout à coup elle s’endormit. Je crus d’abord que ce n’était qu’un assoupissement qu’il me serait facile de dissiper ; mais voyant qu’il augmentait, je me désespérais d’un sommeil qui me devenait suspect. Encore, disais-je, si elle avait satisfait mes désirs, je lui pardonnerais ! Mais s’endormir au moment du triomphe, je ne pouvais m’en consoler. Je l’examinais avec douleur : elle avait les mêmes habits