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Page:Gervaise de Latouche - Le Portier des Chartreux, 1889.djvu/84

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si j’avais pu lire dans son âme, j’aurais vu qu’elle se repentait de m’avoir proposé une difficulté que j’étais hors d’état de résoudre. D’autant plus intéressé à détruire son préjugé, je ne doutai pas que mon bonheur ne dépendît de ma réponse, et je cherchai des raisons pour la convaincre. Je me souvenais parfaitement que le père Polycarpe n’avait pas eu la veille cette difficulté à se retirer de dessus Toinette. Je lui aurais cité cet exemple, mais j’aimais mieux le lui faire voir. Mes raisonnements ne la persuadèrent pas, mais ses désirs suppléaient à ce qu’ils avaient de défectueux. Elle affectait d’insister encore, et il lui fallait un exemple contraire pour la persuader. Dans le moment je vis le bonhomme Ambroise sortir de la maison et gagner le chemin de la rue. Son départ m’offrit l’occasion la plus favorable qui pût se présenter. Ne doutant pas que le père et Toinette ne profitassent de la liberté qu’il leur laissait pour réparer le temps perdu par sa présence, Je dis d’un ton assuré à Suzon : Viens, je veux te faire voir que tu t’es trompée. Je me levai et j’aidai Suzon à en faire autant après lui avoir porté sous sa jupe une main qu’elle repoussa en folâtrant. — Où vas-tu donc me mener ? me dit-elle, voyant que je gagnais la maison. La petite friponne croyait que j’allais la mener dans l’allée : elle m’y aurait suivi. Que j’aurais bien mieux fait d’y aller ! Mais je n’étais pas assez expérimenté pour voir qu’elle ne demandait pas mieux. Je craignais quelque nou-