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V

Je vous ai parlé dans notre dernière causerie, de ces trois couches ou régions que semble distinguer Dostoïevsky en la personnalité humaine, — de ces trois strates : la région de la spéculation intellectuelle, la région des passions, intermédiaire entre la première et cette région profonde où n’atteint pas le mouvement des passions.

Ces trois couches évidemment ne sont point séparées, ni même proprement limitées. Elles s’entre-pénètrent continuellement.

Dans ma dernière causerie, je vous ai parlé de la région intermédiaire, celle des passions. C’est dans cette région, c’est sur ce plan que se joue le drame ; non seulement les livres de Dostoïevsky, mais le drame de l’humanité tout entière, et nous avons pu constater aussitôt ce qui semblait paradoxal d’abord : si mouvementées et puissantes que soient les passions, elles n’ont, somme toute, pas grande importance, ou du moins peut-on dire que l’âme n’en est pas remuée dans ses profondeurs ; les événe-