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Page:Gide - Principes d’économie politique.djvu/201

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une des conditions favorables à la santé morale de l’individu.

Un semblable régime, s’il était généralisé, serait très favorable à la paix sociale et à une bonne répartition des richesses. À raison de sa simplicité extrême, il préviendrait la plupart des conflits qui surgissent aujourd’hui entre les diverses classes de copartageants, notamment entre le travail et le capital. Il ne ferait pas régner l’égalité absolue — et ce serait fort heureux — mais il ne connaîtrait guère d’autres inégalités que celles qui tiennent à la puissance inégale des terres et des instruments de production employés, ou celles aussi qui tiennent aux vicissitudes bonnes ou mauvaises intimement liées à tous les faits de l’homme.

Même au point de vue de la production, la petite production n’est pas si impuissante et si arriérée qu’on le pense. Des producteurs autonomes peuvent s’associer et adopter certains procédés de la grande production et de la division du travail sans sacrifier leur indépendance, leur initiative, leur responsabilité, leur intérêt personnel, tous ressorts puissants de la production que l’entreprise collective risque toujours de détendre un peu.

Dans l’agriculture, par exemple, les petites exploitations ne sont pas absolument incompatibles avec l’association ni même avec les procédés de la grande culture. Les petits propriétaires peuvent s’associer entr’eux pour appliquer sur leurs terres tous les perfectionnements de l’art agricole, pour acheter ou louer en commun des machines ou des chemins de fer Decauville, pour acheter en gros les engrais, semences, plants, pour transporter et vendre à frais communs leurs produits et pour emprunter des capitaux. C’est ce que font déjà, sur une petite échelle, il est vrai, mais qui va grandissant, les syndicats agricoles[1].

  1. Ces syndicats agricoles, dont le développement date de la loi de 1884 (et qui pourtant n’avait été faite qu’en prévision des syndicats ouvriers), sont aujourd’hui en France au nombre de 1500, dont quelques-uns comptent de 8 à 10.000 membres. Ils ont introduit déjà des progrès réels dans l’industrie agricole, en particulier pour l’emploi des engrais chimiques qui étaient jusqu’alors l’objet de falsifications éhontées. Ils font l’éducation des cultivateurs par la publication de nom-