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Page:Gide - Principes d’économie politique.djvu/268

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claration serait-elle lettre morte ? Parce que l’emploi industriel des métaux précieux, bien que de moindre importance que l’emploi monétaire, ne saurait cependant être négligé et il serait suffisant pour empêcher la fixation d’un rapport aussi extravagant que celui que nous venons d’indiquer. Tous les gouvernements du monde auraient beau décréter que l’argent vaudra autant que l’or, jamais hommes et femmes ne paieront pour une montre ou pour une bague d’argent le même prix que pour une montre ou pour une bague d’or[1].

Mais dans des limites raisonnables, nous n’hésitons pas à croire qu’un accord international serait efficace pour fixer la valeur respective des deux métaux et pour supprimer par conséquent le principal inconvénient du système bi-métalliste, à savoir la fuite de l’une des deux monnaies. Où fuirait-elle, puisque par tout pays elle serait soumise à la même loi ?

Maintenant cet accord international est-il possible en fait ? Ceci est une autre question. Il ne le semble pas, car chaque pays met un point d’honneur à adopter l’étalon d’or, ceux qui ont fixé un rapport entre les deux métaux ont établi les rapports les plus différents (Autriche 1 à 18,22, Russie 1 à 23, 25, Japon 1 à 32 1/3, etc.), et au moment où nous écrirons ces lignes le gouvernement anglais vient de décliner les propositions des États-Unis et de la France non seulement pour élargir l’emploi de la monnaie d’argent en ce qui le concerne, mais même pour en reprendre la frappe libre dans l’Inde.

  1. Ajoutons que si, dans une telle hypothèse, ou parvenait à maintenir la valeur de l’or au même niveau que celle de l’argent, comme les frais de production de l’or sont beaucoup plus considérables que ceux de l’argent, il en résulterait que la production argentifère déborderait, tandis que les mines d’or ne tarderaient pas à être abandonnées parce qu’elles ne donneraient plus de bénéfices, et une semblable mesure aurait finalement pour résultat de supprimer la production de l’or dans un délai plus ou moins éloigné. De même que si l’on décrétait qu’un bœuf ne vaudra pas plus qu’un mouton et qu’on réussit à imposer cette base d’évaluation, on peut tenir pour certain que partout l’on renoncerait à l’élevage des bœufs pour celui des moutons et qu’au bout d’un certain temps la race bovine aurait disparu.