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Page:Gide - Principes d’économie politique.djvu/590

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V

DE L’ABSENTÉISME.


On désigne sous le nom d’absentéisme l’habitude prise par les propriétaires ou les rentiers de résider à l’étranger ou du moins hors de leurs terres, et la question qui se pose est de savoir si ce fait entraîne des conséquences fâcheuses pour le pays d’origine et vice versa avantageuses pour le pays de résidence. — Elle est extrêmement complexe et nous ne pouvons guère que l’indiquer ici.

Au point de vue moral l’absentéisme est sévèrement jugé. Mais encore faut-il distinguer. Ce jugement est parfaitement fondé en ce qui concerne les propriétaires fonciers, parce que la propriété foncière est, comme nous l’avons vu, une fonction sociale qui doit être exercée personnellement et non par délégation — ce qui est d’ailleurs la règle pour toutes les fonctions publiques. La propriété foncière qui se fonde sur l’utilité publique n’a plus de fondement ni de raison d’être du jour où son titulaire n’a plus d’autre rôle que de toucher des fermages et démontre par son absence même que le propriétaire n’est qu’un parasite. D’ailleurs, en dehors même de cette considération théorique qui est de poids, l’expérience a montré bien des fois, par exemple en Irlande, que l’absentéisme des propriétaires déléguant leurs pouvoirs à des intendants ou intermédiaires (middlemen) entraînait à la fois la ruine des cultivateurs et cette de l’agriculture[1]. Mais pour les rentiers il en est un peu autrement leur fonction sociale — car ils en ont une aussi, celle de créer et de gérer

  1. Au point de vue social et politique dont il faudrait tenir compte aussi, c’est l’absentéisme des grands propriétaires français attirés à Versailles, qui a contribué à la chute de l’aristocratie française.
    En Roumanie, les propriétaires résidant à l’étranger sont frappés d’impôts sévères.