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Page:Girardin - La Canne de M. de Balzac.djvu/171

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presque pénible par son excès ; c’est l’instant où la pensée timide s’élance, s’abandonne, se livre, où la passion s’exprime, où l’extase retrouve la voix.

Alors la vie s’illumine, notre cœur s’enflamme de mille clartés, comme un temple pour un triomphe, il se pare de toutes ses gloires, il brille comme pour une fête : c’est un triomphe que d’être aimé, et dans les transports de sa reconnaissance, il élève vers l’objet de son culte un Te Deum d’actions de grâces, un hymne de bonheur et d’amour.

Rester seule avec cette enivrante pensée : Il m’aime !… Ce moment est peut-être le plus doux moment pour une femme, chez qui la passion la plus vive est toujours voilée d’un nuage de timidité. C’est alors qu’elle aime, alors qu’elle ose aimer ! Elle est seule, sans témoin, car celui qu’on chérit le plus est encore un témoin.

En sa présence, l’âme est longtemps gênée ; son aspect nous jette dans un si grand trouble, sa voix nous fait tressaillir, son regard nous éblouit, sa pensée nous absorbe ; une