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Page:Giraudoux - Adorable Clio.djvu/160

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rues, et le rend impénétrable aux obus ! Un mort a jeté autour de lui, généreux comme un blessé qui part, sa musette, son bidon, une lettre… Je reviens, longeant des groupes de fantassins qui dorment, les mains hors de leurs capotes, mains blanchies par la lune, et par la craie du plateau, — on n’aurait qu’à serrer ces mains, qu’à les prendre, pour dire aux dormeurs sa pitié, pour les relever jusqu’à soi, — et d’alpins enroulés dans leurs pèlerines, sans mains à étreindre, qu’il faudrait, eux, redresser comme des momies, et le seul moyen de les toucher serait encore de caresser leur visage. Dans une carrière, d’autres soldats fatigués jetés en pile comme des jonchets et le capitaine essaye, sans trop dérouler le tas, d’en retirer par les jambes son ordonnance… Ceux qui prétendaient ne ronfler qu’étendus sur le dos, étendus sur le ventre, ronflent… Parfois des corps un tout petit peu moins boueux, des capotes d’un buvard moins avide qui n’aspire pas toute l’eau, un visage