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Page:Gobineau - Souvenirs de voyage. Cephalonie, Naxie, et Terre-Neuve , 1872.djvu/11

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dans ce vieux pays ; mais vers la fin du dix-septième siècle, un certain Michel Lanza, le héros de sa race, fut anobli par un décret du grand conseil, et même créé chevalier de Saint-Marc ; il donna naissance à une lignée d’avocats et de médecins redoublés, qui s’appelèrent à tout jamais les comtes Lanza, firent fortune, se signalèrent par une avarice sordide, prêtèrent leur argent à gros intérêts aux bourgeois, aux ouvriers, aux paysans frappés de respect, et prirent rang, de l’aveu général, parmi les cinq ou six maisons citées comme les plus respectables et les plus illustres des îles vénitiennes. Tant que la République régna, ces seigneurs, médecins et avocats, furent toujours des premiers admis à la table des provéditeurs, quand ces dignitaires donnaient à souper ; les capitaines des galères se faisaient un honneur de les inviter à leurs fêtes navales ; il ne se jouait pas une partie de pharaon en bonne compagnie qu’ils n’en fussent priés ; quant à eux, de mémoire d’homme, ils ne donnèrent jamais un verre d’eau à qui que ce soit, ce qui confirma leur réputation méritée de patriciens prudents et avisés.