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Page:Gobineau - Souvenirs de voyage. Cephalonie, Naxie, et Terre-Neuve , 1872.djvu/32

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— Je ne le comprends pas non plus, mon jeune ami, dit le vieux Jérôme en secouant la tête d’un air de commisération douloureuse. C’est un fait complètement inexplicable pour moi ; du reste, je veux plaider votre cause auprès de la mère, et vous connaissez trop bien ma fidèle amitié, mon attachement sans bornes à votre famille, pour ne pas être sûr d’avance de mon zèle à défendre vos intérêts. Mais il serait bien important de connaître la cause de votre malheur. Caroline Palazzi n’est pas capricieuse ; il faut que quelqu’un vous ait calomnié. Peut-être avez-vous un rival ?

Le malheureux Gérasime secoua les épaules pour exprimer sa profonde ignorance, et rejeta la tête en arrière, geste turc qui implique toutes les négations possibles, puis ramenant ses regards sur son confident, une idée lui traversa l’esprit. Il lui trouva, au milieu de ses grimaces sympathiques, un zest de goguenarderie qui l’épouvanta. Il lui sembla, dans un éclair de soupçon, qu’il marchait sur quelque chose de dangereux, et cette pensée s’empara si bien de lui, que la conversation changea absolument de caractère.