Page:Gobineau - Souvenirs de voyage. Cephalonie, Naxie, et Terre-Neuve , 1872.djvu/94

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sensible à la perspective de voir les Chrétiens rentrer en possession de Constantinople, et, au rebours de son père et de son parrain, fort animée contre les Turcs, dont elle souhaitait ardemment la destruction radicale. Elle ne doutait pas que ces monstres ne mangeassent les enfants vivants, et elle les croyait à la veille de faire de nouvelles descentes dans l’île. Norton la trouvant fortement imbue de poésie en matière politique, essaya de la mettre sur la littérature ; là, elle montra un vide absolu : elle n’avait jamais rien lu que son livre de prières, et ne l’avait nullement commenté. Il s’étonna que cette imagination, montée à voir des choses si singulières à propos de la future conquête de l’impériale Stamboul et à en entourer la scène de si riches inventions, n’eût pas l’air de soupçonner le moindre charme dans les pages imprimées d’un livre. Il voulut se rabattre à l’analyse des beautés pittoresques de l’île et de la mer. Akrivie parut flattée que le gentilhomme anglais trouvât le pays à son gré ; comme elle n’en connaissait pas d’autre, elle était foncièrement convaincue que c’était le plus beau du monde et le plus aimable ; mais,