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Page:Gobineau Essai inegalite races 1884 Vol 2.djvu/517

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étonnante étendue, impriment à ces monuments un aspect de majesté auquel la mélancolie grandiose et les profusions végétales de la nature viennent ajouter leurs charmes. Le voyageur qui, après plusieurs jours de marche à travers les forêts vierges de Chiapa, le corps fatigué par les difficultés de la route, l’âme émue par la conscience de mille dangers, l’esprit exalté par cette interminable succession d’arbres séculaires, les uns debout, les autres tombés, d’autres encore cachant la poussière de leur vétusté sous des monceaux de lianes, de verdure et de fleurs étincelantes ; l’oreille remplie du cri des bêtes de proie ou du frissonnement des reptiles ; ce voyageur qui, à travers tant de causes d’excitation, arrive à ces débris inespérés de la pensée humaine, ne mériterait pas sa fortune, si son enthousiasme ne lui jurait qu’il a sous les yeux des beautés incomparables.

Mais, quand un esprit froid examine ensuite dans le cabinet les esquisses et les récits de l’observateur exalté, il a le devoir d’être sévère, et, après mûres réflexions, il conclura sans doute que ce n’est pas l’œuvre d’un peuple artiste, ni même d’une nation grandement utilitaire que l’on peut reconnaître dans les restes de Mitla, d’Izalanca, de Palenquè, des ruines de la vallée d’Oaxaca.

Les sculptures tracées sur les murailles sont grossières, aucune idée d’art élevé n’y respire. On n’y voit pas, comme dans les œuvres des Sémites d’Assyrie, l’apothéose heureuse de la matière et de la force. Ce sont d’humbles efforts pour imiter la forme de l’homme et des animaux. Il en résulte des créations qui, de bien loin, n’atteignent pas à l’idéal ; et cependant elles ne sauraient pas non plus avoir été commandées par le sentiment de l’utile. Les races mâles n’ont pas coutume de se donner tant de peine pour amonceler des pierres ; nulle part les besoins matériels ne commandent de pareils travaux. Aussi n’existe-t-il rien de semblable en Chine ; et, quand l’Europe des âges moyens a dressé ses cathédrales, l’esprit romanisé lui avait fait déjà, pour son usage, une notion du beau et une aptitude aux arts plastiques que les races blanches peuvent bien adopter, qu’elles poussent à une perfection