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Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome VIII.djvu/279

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les arts en rapport les uns avec les autres. Et la faute même que je commis de tomber quelquefois dans la poésie descriptive me profita plus tard, après des réflexions plus mûres, parce qu’elle fixa mon attention sur la différence des arts. Il se trouvait plusieurs de ces petites pièces dans le recueil que Behrisch avait fait, mais il ne s’en est rien conservé.

Ce domaine des arts et du goût, dans lequel Œser vivait, où il entraînait quiconque le fréquentait assidûment, prenait un caractère toujours plus élevé et d’autant plus charmant que l’artiste aimait à s’entretenir des hommes, morts ou absents, avec lesquels il avait été ou se trouvait encore en liaison. Car, s’il avait une fois donné à quelqu’un son estime, il le témoignait invariablement dans sa conduite et ne changeait plus de sentiments.

Après nous avoir vanté surtout, parmi les Français, M. de Caylus, il nous parla des Allemands qui se distinguaient dans le même genre. Nous apprîmes, par exemple, que le professeur Christ avait rendu d’excellents services par son goût pour les arts, par ses collections, ses connaissances, sa coopération, et qu’il avait fait servir sa science au véritable progrès des arts. En revanche, il ne fallait pas parler de Heinecken, soit parce qu’il s’occupait beaucoup trop curieusement de la première enfance de l’art allemand, pour laquelle Œser avait peu d’estime, soit parce qu’il s’était mal conduit avec Winckelmann, ce qu’on ne pouvait lui pardonner. Notre attention fut vivement portée sur les travaux de Lippert, dont notre professeur savait fort bien relever le mérite. « Car, disait-il, bien que les statues et les grandes figures soient toujours le fond et le comble de toute connaissance de l’art, cependant on a rarement l’occasion de les voir en original ou en copie. Lippert, au contraire, nous fait connaître un petit monde de gemmes, dans lequel le mérite plus saisissable, l’heureuse invention des anciens, leur sage composition, leur exécution élégante, étonnent davantage, sont mieux compris, en même temps que la foule des objets permet mieux la comparaison. » Tandis que nous étions occupés de ces choses, autant que cela nous était permis, on nous signala les grands travaux esthétiques de Winckelmann en Italie, et nous étudiâmes dévotement ses premiers écrits,